Aumônerie des prisons.

Zachée, ombre et lumière.

01 février 2018

Il est sorti de sa prison intérieure ...

Son histoire (Luc 19,.1-10) fait partie de ces « éclats d'Évangile » (1) ces images qui parlent d'elles-mêmes comme un scénario qui raconte un itinéraire inattendu. L'ombre du personnage de Zachée, c'est le métier peu recommandable qu'il exerce, celui de collecteur d'impôts exploitant la population pour le compte de l'envahisseur romain. On pourrait dire un « collabo ». Desservi par sa petite taille, s'enrichissant sur le dos des pauvres, il a tout contre lui.
On se demande ce qu'il fait là, au milieu de la foule qui se presse auprès de Jésus. Il ne pourra l'apercevoir... même en se mettant sur la pointe des pieds. Il n'a que la solution de grimper sur la branche d'un arbre au bord du chemin.
Curiosité ?
Qu'est-ce qui peut ainsi l'attirer ?
Transformé par Jésus
Voilà Jésus qui passe sous l'arbre. Il lève les yeux. Son regard rencontre celui de Zachée. Et, chose inouïe, Jésus l'invite à descendre car il veut demeurer chez lui ce soir. Incompréhension tout autour. Cette scène a de quoi rendre tout le monde jaloux.
Jésus ne sait-il donc pas qu'il s'invite chez un pécheur ? Zachée est « tourneboulé ». Il se laisse transformer par Jésus. Il se met en mouvement.
Il choisit un autre chemin, celui de la vie. Il espère voir jésus, il l'écoute. Il va désormais résister à ses penchants mauvais (2). Et cela se traduit immédiatement par une générosité nouvelle : il donne la moitié de ses biens aux pauvres, restituant l'argent au quadruple à ceux qu'il a lésés.
Zachée, à priori irrécupérable, est passé de l'ombre à la lumière. Un peu comme ces éclats qui filtrent en pluie d'or entre les branches des arbres quand on traverse une forêt. N'est-ce pas l'ombre qui rend la lumière aussi belle?
Cette pluie d'or est la richesse nouvelle qui inonde l'homme Zachée. À l'inverse de la richesse bassement matérielle, qui l'empêtrait dans sa médiocrité.
Un texte qui parle aux prisonniers
L'histoire de Zachée est familière à nos amis détenus. Ils comprennent ce qu'est l'enfermement, l'exclusion de la société, la dignité bafouée, le repli sur soi, bref tout ce qui pour Zachée constituait la vie d'avant, c'est-à- dire l'ombre.
Mais ils font eux aussi leur chemin, surpris par ces étincelles qui surgissent parfois : une visite qui fait plaisir, la nouvelle d'une remise de peine ou une parole amicale qui fait chaud au cœur. Jésus consolateur est auprès des prisonniers comme il a été près de Zachée, Jésus qui est venu chercher et sauver ce qui était perdu.
Aumôniers, semaine après semaine, nous avons à témoigner de l'amour de Dieu, qui est lumière, à tous ceux qui vivent dans la noirceur du quotidien, qui souffrent et pleurent dans leurs nuits interminables.
« Afin que par la consolation dont nous sommes l'objet de la part de Dieu, nous puissions consoler ceux qui se trouvent dans la peine » (Paul, 2 Corinthiens 1.4).

Jean-Claude GÉNIN

Aumônier au Centre pénitentiaire d’Avignon

 

(1) Éclats d'Évangile est le titre d'un livre de Marion Müller-Colard (Bayard-Editions)

(2) Choisir la vie : espérer, écouter résister était le thème central de notre réunion nationale d'aumôniers protestants à Strasbourg, fin octobre 2017.

Commentaires