Une journée avec un pasteur aumônier militaire

01 avril 2018

Le dernier dimanche de janvier est traditionnellement dédié par l’Église de La Mothe-Saint-Héray à un thème précis, historique ou d’actualité. Cette année, elle avait invité le pasteur Samuel, aumônier protestant aux Armées.

Le parcours pastoral de Samuel, qui se présente comme issu d’une famille judéo-luthéro-réformo-évangélico-salutiste, a débuté par une conversion à l’âge de vingt ans suivie d’un engagement sans faille : Armée du Salut, Fédération des Églises évangéliques baptistes de France, direction en 2003 d’un centre du renouveau charismatique dans le Gard, Aumônerie militaire en 2006 en Champagne-Ardenne, enfin administrateur d’A Rocha France, une ONG chrétienne d’études. Dès lors s’enchaînent les opérations extérieures : Côte d’Ivoire (opération Licorne), Afghanistan (opérations Pamir), Liban (mandat FINUL), Sahel (opérations Barkhane au Mali, Niger et Tchad).

Apporter un réconfort spirituel

Si l’Éternel aux armées est cité ou invoqué plus de 280 fois dans l’Ancien Testament, il faut attendre François Ier pour que prenne forme l’aumônerie aux Armées.

 

Une ambiguïté demeure, celle de la compatibilité des armes et du ministère pastoral quel qu’il soit. L’aumônerie protestante apparaît en 1854 lors de la guerre de Crimée qui oppose les alliés franco-britanniques aux Russes. La loi de 1905 établit la neutralité de l’État tout en garantissant la liberté de culte dont ne sont pas exclus les hôpitaux, les prisons et les armées. L’armée française compte aujourd’hui 200 aumôniers catholiques, 72 protestants, 27 israélites, 40 aumôniers musulmans et un orthodoxe.
La fonction d’aumônier militaire est précisée par un décret de 1964. L’aumônier n’est pas un civil mais un soldat non combattant ; il dispose d’armes défensives sur le terrain pour ne pas compromettre la sécurité de ses frères d’armes sur le terrain. Les aumôniers tombent aussi au champ d’honneur. L’aumônier est un officier doté d’un « grade miroir » selon de Lattre de Tassigny, ce qui veut dire qu’il se place hors hiérarchie : s’adressant à un lieutenant, il est lieutenant, s’adressant à un général, il est général.
L’enjeu est d’apporter un soutien éthique et un réconfort spirituel à des hommes et des femmes parfois dépourvus de culture religieuse mais que relie une fraternité d’armes. Il est aussi conseiller auprès du commandement.

Nouer des liens d’humanité

Assurément, le commandement judéo-chrétien Tu ne tueras pas et l’injonction évangélique à vivre en paix ne sont pas contradictoires. Nous sommes encore sous l’empire du péché, et nous attendons le retour du Christ. Samuel dit aussi comprendre au nom de sa propre liberté de conscience les objections de conscience. La paix reste un horizon d’attente : l’idéal pour les militaires c’est de se retrouver au chômage, de déposer les armes.
L’aumônier militaire respecte les règles d’engagement ainsi que les conventions de Genève que, souligne-t-il, les terroristes n’ont pas signées à la différence des armées régulières : dans les conflits asymétriques, le brassard de la Croix Rouge n’est pas arboré car les hommes qui le portaient étaient les premiers à se trouver dans le viseur des terroristes.
L’essentiel, selon le pasteur, c’est l’éthique qui fonde la noblesse d’âme. Même en situation de guerre, surtout en situation de guerre, il convient de progresser éthiquement, bibliquement, de nouer des liens d’humanité.
En définitive, l’aumônier est à la fois un couteau-suisse et un serviteur. Son engagement exige une éthique à hauteur d’homme. L’orateur conclut en citant Matthieu 5.8 : Heureux ceux qui procurent la paix, car ils seront appelés fils de Dieu.

Jean-Pierre Andrault

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