Redécouvrir les trésors de notre foi commune

Un regard catholique sur Luther

01 novembre 2017

J.C. Escaffit a été journaliste à La Croix, à La Vie et au Jour du Seigneur. Auteur de « Sur les traces du père » (Salvator) préfacé par Yasmina Khadra, et coauteur de « Histoire de Taizé » (Le Seuil 2016), il est très engagé dans l’œcuménisme. Témoignage.

Commémorer ensemble le cinq centième anniversaire de la Réforme de Luther ? Il faut avouer que l’invitation de nos frères protestants a de quoi surprendre les catholiques. Comme si un couple divorcé était invité à fêter l’anniversaire de sa séparation. Et pourtant, quelle belle occasion ! D’abord celle de ne pas se contenter de la Semaine de prière pour l’unité des chrétiens, une rencontre rituelle de quelques heures dans l’année, avant de retourner chacun à nos occupations domestiques.

Jean-Claude Escaffit lors de l’émission « Dialogue œcuménique » sur Dialogue RCF Aix-Marseille Provence © Maud de Bourqueney

Des trésors enfouis

Si j’ai bien des occasions de cultiver de solides amitiés protestantes, il me semble que cet anniversaire est cependant une vraie opportunité. D’abord pour approcher un inconnu célèbre nommé Luther. Ainsi que les 95 thèses que ce moine catholique allemand a affichées sur la porte d’une église de Wittenberg, le 31 octobre 1517. Au-delà de leur aspect parfois rébarbatif et suranné, elles révèlent des trésors enfouis de notre foi. Richesse que nous avons mise, nous catholiques, plus de quatre siècles à redécouvrir. J’aime particulièrement la 62e qui affirme que « le véritable trésor de l’Église, c’est le très saint Évangile et la grâce de Dieu. »

Se remettre en cause pour avancer

Nous avons parfois l’impression de faire du surplace dans l’œcuménisme. Et pourtant, que de chemin parcouru depuis Vatican II ! La démarche protestante n’aurait pas été possible sans une conversion de nos regards, d’ailleurs encouragée par nos papes depuis Jean 23 et par « nos » pasteurs (comme j’aime à les appeler lors de nos temps de méditation chrétienne au temple d’Aix-en-Provence). Et pour preuve aussi, le lancement de l’année Luther en présence du pape François, le 31 octobre 2016 à Lund, en Suède.

Nous avons besoin de dissidents dans nos Églises, de remises en cause de notre foi, pour nous faire avancer. Luther n’a pas voulu la rupture ; il a d’abord cherché à mettre en garde le pape contre les prédicateurs d’indulgence et une Curie corrompue. Avec l’ardent désir de revenir à l’essentiel du message évangélique.

 

Un chemin vers la réconciliation

Et plutôt que la célébration d’un divorce, cette commémoration nous conduit à une démarche plus appuyée de réconciliation. Sans faire l’économie d’un regard sur les blessures du passé. J’ai pu les toucher du doigt au musée et l’assemblée du désert, le 3 septembre dernier.

Cet anniversaire permet aussi de mesurer nos enrichissements, nos influences réciproques. Mais il révèle en même temps une souffrance : celle de ne pas encore partager pleinement la même table, à défaut d’espérer habiter bientôt sous le même toit.

 

Jean-Claude ESCAFFIT

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