Édito

Un monde de grâce

01 décembre 2019

Il faut accepter de faire ce constat : le mot « grâce », au singulier, est une tarte à la crème en milieu protestant...

... Avouons qu’il est, ce mot, tellement pur, séduisant, suggestif, édifiant, multi-sémantique, poly-valant… et finalement gratifiant ! La grâce peut expliquer la terre et les enfers, les succès de la Réforme et ses ratés, elle permet d’inverser les ordres et les préséances, de mépriser les pouvoirs et d’habiter les cieux… Et se réclamer de la grâce, c’est tout de suite placer la barre assez haut : nous-mêmes, nés par grâce, nous mourrons par grâce, n’est-ce pas ! Ce monde de grâce dans lequel le protestant évolue, il nous rend légers, élégants, détachés et généreux, sans culpabilité ni…

Mais tout de même, il semble que la grâce se porte particulièrement bien dans une société de riches. Face aux grandes détresses du monde, ou face aux « pauvres » dans la rue, que faire de ma mirobolante cassette de grâce ? Comment la partager ? Comment vanter ses mérites, pardon… son éclat, au ras du trottoir ?

La grâce de Dieu a certes la capacité de nous mettre au boulot, nous les riches, sans trop de culpabilité ou de satisfaction. Mais elle pourrait aussi ressembler à ce mendiant qui, à la sortie d’un bureau de poste, il y a des années, avec conviction m’a adressé une parole de bénédiction au nom de Dieu. Il était, lui, le porteur de la parole essentielle qui manquait à tous ! Et son cadeau lumineux brille encore.

Séverine Daudé
rédactrice en chef d’Échanges

 

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