Lectures en tension(s) (9) : Le récit de la Pentecôte (Actes 2.1-13)

Pour une unité plus qu’une uniformité

01 mai 2017

Dans le Livre des Actes, les apôtres vivent une Pentecôte un peu particulière. C'est d'abord la réalisation des promesses de Jésus : l'envoi de l'Esprit qui va bouleverser leur vie. Tout peureux qu'il était, voilà que Pierre se met à haranguer la foule des juifs venus célébrer la commémoration du don de la Loi reçue par Moïse sur le mont Sinaï.

Pour rendre compte de la venue de l'Esprit, Luc reprend les images bibliques habituelles racontant les manifestations de Dieu, celles que l'on trouve dans le récit de l'Exode à propos de la remise des Tables de la Loi : coup de tonnerre, éclairs, nuée, feu, vent.

Le contre-pied de Babel

Plus symbolique encore, le miracle des langues nous raconte que tous les auditeurs, venus de nations différentes et parlant certainement d'autres langues, comprennent « dans leur langue maternelle » le discours de Pierre en araméen. C'est pourquoi, de nombreux commentateurs ont remarqué que ce récit des Actes des Apôtres prend le contre-pied de celui de Babel et montre le projet du Dieu de l'Alliance.

Certes, on n'a pas toujours bien compris l'histoire de la Tour de Babel en prenant à la lettre ce récit, sans voir le message que ce mythe voulait vraiment transmettre. Dieu n'est pas responsable du malheur des hommes, ce n'est pas lui qui punit mais c'est l'homme qui, en ne connaissant pas ses limites, veut faire un monde sans Dieu, une tour qui monte jusqu'au ciel, et veut faire l'unité du genre humain par l'uniformité. Et puis il s'étonne que cela ne marche pas mais engendre des dictatures, des totalitarismes, une pensée unique…

En fait, le récit de la tour de Babel bien compris rejoint l'esprit de la Pentecôte qui veut nous faire comprendre que, malgré des langues et des cultures différentes, des hommes peuvent se comprendre s'ils sont remplis de l'esprit de Jésus : un esprit de tolérance, d'amour qui permet à l'autre de vivre sa différence.

La diversité n’est plus un obstacle

En effet, quand les apôtres parlent, le jour de la Pentecôte, chacun les entend s'exprimer dans sa langue maternelle. Attention, il n'est pas dit qu'ils parlent tous la même langue : les apôtres parlent leur propre langue et les autres comprennent.

La diversité des langues n'est donc pas abolie mais elle n'est plus un obstacle à la communication, à la communion. Le message de la Pentecôte nous invite à ne pas confondre unité et uniformité. La Pentecôte, c'est l'ouverture sur l'universel, c'est l'unité dans la diversité, contrairement à Babel où les hommes voulaient faire l'unité par l'uniformité, sans la diversité. La Pentecôte, c'est l'éclat des couleurs de l'arc-en-ciel. C'est tout le contraire d'une société gommant les différences, et préférant les unanimités de façade à la tolérance qui permet de négocier les affrontements.

Ceux qui refusent une société multiraciale, qui rêvent d'une société refermée sur elle-même, sur son identité nationale, ou d'une Église monolithique, devraient se souvenir du projet de l'Esprit saint, le jour de Pentecôte.

 

Jean-Marie DELCOURT
Ensemble fédératif des vallées cévenoles

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