Ce que mes yeux ont entendu

17 novembre 2016

L’Église du Marais entretient un dialogue constant avec les artistes et régulièrement, ils collaborent ensemble autour d’expositions ou d’événements ponctuels. Cette année, à l’occasion de la Nuit Blanche 2016 le 1ère octobre, l’Église invite la plasticienne Noémie Daval, accompagnée des musiciens et chanteurs Hannah Clair et Estienne Rylle pour une performance qui mêle visuel et sonore.

Le temps d’une soirée, les artistes proposent un dialogue improvisé entre musique et vidéos projetées. Dans la lignée du thème Franchissement défini par l’équipe de la Nuit Blanche, ensemble, ils construisent une œuvre à la croisée de leurs domaines respectifs. Le public est invité à les accompagner dans leur recherche commune et à plonger dans un espace musical.

Ce que mes yeux ont entendu est un projet qui questionne le passage de l’auditif à l’image, de l’immatériel au matériel. Depuis 2014, le travail de Noémie Daval s’oriente vers la synesthésie : elle conçoit des sculptures, des installations, sur la base de l’écoute des sons/musiques produits par quatre musiciens, Hannah Clair, John Featherstone, Hanna Robert et Ruben Bekx. Chaque note, chaque accord est transcrit en couleur, en un matériau et correspond à une place dans l’espace. Les sculptures créées s’écoutent, s’observent. Elles sont les réminiscences, les fragments de ce qu’elle a vu dans chacun des morceaux.

Franchissement

L’artiste travaille ainsi sur les passages, sur le dépassement des frontières. Dans sa pratique, elle met en place des systèmes qui laissent une part importante à l’improvisation, à l’inconnu : Ce que j’aime, c’est me laisser surprendre par le résultat, explique Noémie Daval. Quand je conçois une pièce, j’écoute d’abord la musique créée par le musicien. Je la vois mentalement, en partie ou en totalité. Je passe ensuite une grande partie de mon temps à chercher comment techniquement je vais pouvoir la réaliser. L’enjeu est de rester fidèle à ce que mon cerveau a créé comme associations et en un sens, lui faire confiance jusqu’au bout. C’est une démarche qui ne m’est pas naturelle puisque j’ai l’habitude pour d’autres projets de réfléchir et de justifier chaque étape de création. De fait, avec « Ce que mes yeux ont entendu », j’apprends l’abandon, le lâcher prise.

Elle poursuit : Pour la Nuit Blanche, le processus sera un peu différent : il s’agira d’un live donc j’aurai moins de temps pour faire les transcriptions et les musiciens adapteront aussi leur musique à ce que je produirai en vidéo. Ce sera comme une discussion : nous aurons le sujet, mais découvrirons ensemble sa conclusion.

Complémentarité

À côté de sa pratique artistique, Noémie Daval est graphiste designer et a collaboré récemment avec les éditions Première Partie et les OPM, le temps d’illustrer un livre qui recueille les prières d’enfants de vingt-trois pays autour du monde. Étrangement, j’ai l’impression que mes deux activités se complètent et s’enrichissent l’une de l’autre. Par exemple, le travail sur la synesthésie me permet de développer des palettes de couleur que je vais réutiliser pour mes dessins… Aussi, pour ma foi, en tant que graphiste, je vais être amenée à dessiner, pour d’autres, pour des clients, des symboles chrétiens, faire du pur figuratif. En tant que plasticienne, il s’agit plus d’une quête personnelle, d’un chemin à la Kundera : je cherche, je marche avec Dieu et je me mets à regarder et à interroger l’autour, la matière, l’espace, le temps. Il y a aussi une part en moi qui veut aussi simplement célébrer la création.

Mialy Rakoto

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